« Le Sénégal n’a pas adhéré à l’ITIE pour devenir un Etat transparent mais…», Ousmane CISSE, DMG

Sénégal

Le Sénégal est tout a fait prêt à jouer le jeu de la transparence dans la gestion des ressources tirées des industries extractives, selon Ousmane CISSE, Directeur des Mines et de la Géologie.

Le nouveau Code minier de 2016 insiste beaucoup sur les questions environnementales et sociales. Qu’est ce qui justifie cette orientation ?

Aujourd’hui, il est reconnu que la conciliation des intérêts de l’industrie minière et les exigences du développement durable représente un grand défi pour l’ensemble des acteurs. Une telle conciliation doit désormais se fonder sur une approche inclusive qui prend en compte l’ensemble des considérations économiques, sociales et environnementales des opérations minières. Ainsi, c’est avec justesse, sur le plan des lois et règlements, que des innovations majeures soient apportées pour souligner toute l’importance que revêtent, pour l’Etat du Sénégal, les dimensions environnementales et sociales des projets miniers.

S’agissant des questions environnementales, le nouveau code minier affirme que la protection de l’environnement et des droits humains ainsi que le renforcement du contrôle des opérations minières deviennent des objectifs clés de la politique minière. Désormais, l’évaluation environnementale est requise dès la phase Recherche. Ainsi, des dispositions appropriées ont été prises dans le sens de la mise en place d’un Fonds de réhabilitation des sites miniers, alimenté par tous les titulaires de permis d’exploitation.

Aussi, la loi procède à l’affectation de 0.5 % du chiffre d’affaires hors taxes des sociétés minières au Fonds d’appui aux collectivités locales et au versement de 20% des recettes de l’Etat provenant des opérations minières à un Fonds d’appui et de péréquation destinés aux collectivités territoriales. L’ensemble de ces mesures doivent contribuer à satisfaire les principes de la loi constitutionnelle de 2016 qui affecte la propriété des ressources naturelles au peuple et qui dispose que l’exploitation et la gestion desdites ressources doivent se faire dans la transparence et de façon à générer une croissance économique, à promouvoir le bien-être de la population en général et à être écologiquement durables.

A propos de la transparence dans la gestion des ressources minérales, les efforts du Sénégal ont été sanctionnés positivement avec la notation « Progrès satisfaisants » par le Conseil d’administration de l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE). Qu’est-ce que cela vous inspire ?

En déclarant le Sénégal 1er pays Afrique et 4ème dans le monde à obtenir une telle notation, en si peu de temps, j’estime que c’est un résultat largement positif. Cette reconnaissance de la communauté internationale confirme notre opinion au tout début du processus. J’ai toujours exprimé ma confiance à l’excellente qualité du système de gestion des ressources minérales au Sénégal. Je considérais déjà que l’adhésion du Sénégal à l’ITIE était un plus, et qu’à l’issue du processus de validation auquel il était soumis depuis juillet 2017, tous les efforts accomplis par l’Etat pour s’appliquer les normes de transparence dans la gestion des ressources minérales seraient payants.

Le Sénégal n’a pas adhéré à l’ITIE pour devenir un Etat transparent, mais plutôt pour montrer qu’il dispose d’une administration efficace et transparente. Pour arriver à ce résultat, de nombreuses initiatives ont été prises, à travers, d’une part, l’amélioration du système de délivrance et de gestion des titres miniers, et d’autre part, pour faciliter l’information du public et l’accès aux documents détenus par les autorités publiques et les sociétés minières. Il est évident que cette reconnaissance de l’ITIE n’est pas une fin en soi. Elle réconforte l’Etat dans ses choix et consolide la réforme constitutionnelle de 2016 qui inscrit la transparence au cœur de la politique minière.

De plus en plus les populations abritant les opérations minières réclament une plus grande implication dans le processus de délivrance des titres miniers et surtout au moment de la négociation des conventions minières. Comment satisfaire cette doléance des populations ?

Je voudrais préciser que les populations sont bien impliquées au processus de prise de décision, particulièrement au stade de validation de l’étude d’impact environnemental et social du projet. Préalablement à la délivrance d’un titre minier d’exploitation, les populations sont consultées à travers la tenue d’audiences publiques pour décider de la réalisation du projet. Toutefois, cette préoccupation étant récurrente, il me semble nécessaire de s’arrêter sur cette question et de trouver des réponses pertinentes. A ce titre, je pense qu’il nous faut développer une nouvelle approche de participation des populations. Cette stratégie devrait reposer sur une participation proactive visant plutôt l’implication que la consultation. Il faut donner l’opportunité aux populations de participer le plus tôt possible dans le processus décisionnel du projet en mettant en place un système d’information et des outils de communication pour une compréhension partagée des enjeux.

Amayi Badji

Originally posted 2019-01-16 10:29:24.