« Sans protection face à Boko Haram », des centaines de civils fuient leurs villages au Nigeria

Les 1 200 soldats tchadiens déployés dans le nord-est du pays pour lutter contre les djihadistes ont été rapatriés. Et les militaires nigérians qui travaillaient à leurs côtés sont partis eux aussi.

Leur départ a semé la panique dans le nord-est du Nigeria. Les 1 200 soldats tchadiens qui y étaient déployés depuis neuf mois dans le cadre de la lutte contre le groupe djihadiste Boko Haram sont rentrés dans leur pays, vendredi 3 janvier, au terme de leur mission.

« Il n’y a plus aucun de nos soldats au Nigeria. Ceux qui sont rentrés vont regagner leur secteur du lac Tchad », a déclaré samedi le porte-parole de l’armée tchadienne, le colonel Azem Bermandoa, sans préciser si ces militaires allaient être relevés par d’autres.

« Les soldats tchadiens ont quitté leur base à Gajiganna et dans la ville garnison de Monguno, avec leurs tanks et tout leur équipement militaire », a expliqué à l’Agence France-Presse (AFP) un membre des milices civiles engagées dans la lutte contre les djihadistes, sous couvert de l’anonymat.

« Les soldats nigérians qui travaillaient aux côtés des Tchadiens sont partis eux aussi », a-t-il ajouté, sans préciser si ce départ était un ordre de la hiérarchie ou si les soldats s’étaient enfuis.

« On se sent vulnérables »

« En conséquence, la plupart des résidents de Gajiganna sont partis à Maiduguri, la capitale de l’Etat du Borno, de peur que les “terroristes” viennent les attaquer », selon la même source.

Un habitant du village, contacté par l’AFP, explique être parti, avec environ 400 personnes, mercredi : « Dès que nous avons réalisé que les soldats nigérians avaient eux aussi quitté leur base, peu après le retrait des Tchadiens. »

« Quasiment l’ensemble du village est parti car on se sent vulnérables et sans protection face à Boko Haram. »

Des centaines de civils nigérians installés dans la région, à proximité des bases des contingents tchadiens, ont pris la fuite.

L’insurrection de Boko Haram et de sa faction Iswap (pour Islamic State West African Province – « Etat islamique de la région de l’Afrique de l’Ouest », en français), affiliée à l’organisation Etat islamique (EI), continue à faire rage dans la région du lac Tchad. Les combats entre le groupe et l’armée nigériane ont fait au moins 35 000 morts depuis 2009, et se sont propagés au Niger, au Tchad et au Cameroun voisins.

Depuis 2015, les pays de la région luttent contre Boko Haram et l’Iswap au sein de la Force multinationale mixte (FMM), une coalition régionale engagée autour du lac avec l’aide de comités de vigilance composés d’habitants. C’est dans ce cadre que les 1 200 soldats tchadiens avaient été envoyés au Nigeria.

Ces dernières semaines, le Tchad a été confronté à plusieurs attaques meurtrières du groupe djihadiste. A la mi-décembre, 14 personnes ont été tuées et 13 portées disparues dans un village de pêcheurs situé sur le pourtour du lac.

Le Cameroun fait lui aussi face à un regain d’attaques de Boko Haram, d’après un rapport d’Amnesty International publié en décembre, qui fait état de 275 personnes, dont 225 civils, tuées en 2019.

lemonde.fr