Mode africaine: quand la nouvelle génération de créateurs s’y met

Sénégal

Pendant quatre jours, Esmod Isem Paris, la plus ancienne des écoles de mode françaises, a gagné les couleurs de l’Afrique. Une riche programmation de conférences, projections et performances présentait cette semaine à la nouvelle génération de créateurs et manageurs le dynamisme de la mode africaine contemporaine.

L’Afrique a toujours inspiré la mode. D’Yves Saint Laurent à Stella McCartney, en passant par Marc Jacobs, nombreux sont les créateurs qui ont puisé dans la richesse esthétique et la tradition ornementale du continent africain, de façon plus ou moins réussie, au risque d’être parfois accusés d’appropriation culturelle. Mais au-delà d’une source d’inspiration pour les designers occidentaux, la mode africaine représente un marché important et une infinité de créateurs locaux, qui trouvent petit à petit leur place dans l’industrie concurrentielle de la mode.

Tandis que les Fashion Week de Lagos ou de Dakar attirent de plus en plus les regards de la presse étrangère, les acteurs locaux commencent à s’organiser. Lors de la dernière édition du FIMA, le Festival International de la Mode en Afrique, qui a fêté ses 20 ans au Maroc, on a même lancé l’idée de la création d’une fédération afin d’organiser l’exportation de la mode africaine.

Face à cette ébullition créative et entrepreneuriale, mais aussi inspirés par un marché en pleine expansion, les acteurs de la mode parisienne se mobilisent. Plusieurs événements autour de l’Afrique ont eu lieu ces derniers mois et, cette semaine, en parallèle de la Fashion Week, c’était le tour du secteur de la formation s’y mettre.

Du 15 au 18 janvier, les locaux d’Esmod Isem à Pantin ont accueilli la première édition de la Fashion Week Experience, un événement ouvert aux professionnels du secteur et aux étudiants, qui a eu comme thématique inaugurale l’Afrique. L’école, qui forme des créateurs, mais aussi les manageurs de l’industrie de la mode, a voulu sensibiliser ses étudiants sur ce marché aussi créatif que porteur.

« Il était important pour les étudiants de s’ouvrir aux opportunités dans les marchés de demain. Et très clairement, le continent africain, par sa richesse et par sa diversité, représente aussi l’avenir de notre secteur », explique Loetitia Fontugne, directrice de l’enseignement d’Isem et organisatrice de l’événement.


La marque Peulh Vagabong a fait parler d’elle après avoir été portée par Beyoncé.Peulh Vagabond/Isem

Économie solidaire et transmission de savoir-faire

« Au départ, les étudiants ont été assez surpris du choix de l’Afrique comme première thématique de cet événement et ils ont découvert sur le programme un certain nombre de créateurs qu’ils ne connaissaient pas. Surtout parce que nous avions fait le choix de proposer des noms très variés : des créateurs qui travaillent sur le continent africain, mais aussi des Français qui ont des origines africaines ou qui font fabriquer en Afrique, qu’ils soient des toutes jeunes marques ou des noms plus établis ».

Au programme, des tables rondes avec des créateurs des marques Sakina M’Sa, Peulh Vagabond, Iamisigo ou encore Tiss’Ame. Sans oublier Youssouf Fofana, de la Maison Château Rouge, qui a d’ailleurs été le parrain de la dernière promotion de l’école. L’économie solidaire et des sujets comme la transmission des savoir-faire traditionnels au service du développement local faisaient partie également de l’événement. « La dimension solidaire touche beaucoup cette génération d’étudiants », signale Loetitia Fontugne.

Wax In The City

Côté marché, le public a pu connaître le potentiel du continent africain lors des conférences avec Martine Leherpeur, du bureau de conseil du même nom et une référence dans l’industrie de la mode, ainsi que Ramata Diallo, consultante mode spécialisée en Afrique. Le programme a été complété par une projection du film Wax In The City, suivi d’un débat avec son réalisateur Elie Séonnet, et une performance de l’artiste franco-congolais Kouka.

« Cela a suscité des envies, résume Loetitia Fontugne. Les créateurs ont su communiquer leur passion et, à la fin, plusieurs étudiants ont exprimé la volonté de les rejoindre dans leurs projets, notamment dans le cadre de leurs stages de fin d’études ».