Le photographe sud-africain Guy Tillim a sillonné le continent africain et capté les changements historiques et sociétaux au fil des ans. Son exposition « Museum of the Revolution » à la Fondation Henri Cartier Bresson à Paris nous promène à travers onze pays africains et diagnostique leurs transformations dans les rues, entre avenues cossues, marchés grouillants et artères vivantes.
Guy Tillim vit en Afrique du Sud et sillonne le continent africain depuis plus de 30 ans. « Guy Tillim est un Blanc, mais un Blanc africain, ce qui pose toujours des problèmes, souligne Agnès Sire, la commissaire de l’exposition à la Fondation Henri Cartier-Bresson. On a également exposé Pieter Hugo qui est dans le même cas et à chaque fois, il y a un problème d’identité, puisque, je pense que ce n’est pas simple d’être africain et blanc, avec le passif qui existe en Afrique du Sud.
Dans l’exposition Museum of the Revolution, le photographe, lauréat du prix Henri Cartier-Bresson 2017, montre le quartier de son enfance à Johannesburg qui s’est radicalement transformé au fil des années :
«Bien sûr, Johannesburg était une ville de Blancs, explique Guy Tillim, et à la fin de l’apartheid, autour de 1992, les Noirs ont commencé à s’y installer et les Blancs l’ont quitté pour aller dans les banlieues alentour. Une période instable s’en est suivie. Les immeubles n’étaient pas entretenus. Les marchands du sommeil ont pris le contrôle du centre-ville. Et ça a été un combat pour la ville de Johannesburg de reprendre la main. Mais, je crois que maintenant c’est gagné. »

Avenue du Pr. L. Sedar Senghor, Dakar, Sénégal, 2017.© Guy Tillim, Courtesy of Stevenson, Cape Town and Johannesburg
Une Afrique moderne
En tout cas, c’est une image grouillante de vie qu’il capte dans la rue. Guy Tillim nous promène dans ses photos de Dakar à Dar es Salam en passant par Accra, Abidjan, Libreville… dans des paysages urbains aux avenues larges. Une Afrique moderne où des hommes en veston croisent des vendeurs ambulants, des corps en mouvements, des regards parfois droits dans l’objectif, d’une présence forte. « Les gens qu’il photographie viennent souvent vers lui. Il y en a aussi qu’on voit de dos, mais la fluidité du corps, la présence du corps dans les images, c’est incroyable. »
L’observateur des changements
De la décolonisation aux régimes indépendants, parfois avec des emprunts aux pratiques socialistes jusqu’aux États capitalistes, le photographe est l’observateur de tous ces changements: « La première fois que je suis allé à Maputo, c’était la capitale d’un État marxiste, c’était en 1986. L’activité commerciale était très réduite. Il y avait de grandes avenues, mais une économie stagnante. Et bien sûr, cela a complètement changé depuis que ce n’est plus la République populaire du Mozambique. La vie dans la rue s’est automatiquement transformée. C’est devenu un état capitaliste et ça se voit sur les gens : comment ils marchent, ils s’habillent, le genre de business qu’ils pratiquent. Cela m’a intéressé de me trouver là et de photographier cette transition. »
Des images de grand format de la rue africaine où le photographe capte le mouvement en plein vol. Saisissant de vie.

« Marshall St. Johannesburg, Afrique du Sud, 2014.