Controverse.Les Blancs doivent-ils cesser de vouloir sauver l’Afrique  ?

Afrique

Au Royaume-Uni, Stacey Dooley, une célébrité du petit écran, a pris part à un programme caritatif. Mais la publication d’une photo d’elle avec un enfant ougandais dans les bras a déclenché une polémique autour du “complexe du sauveur blanc”.

OUI

Un colonialisme persistant

 The Daily Telegraph, Londres

Stacey Dooley se prend-elle vraiment pour une “sauveuse blanche” ? C’est ce qu’affirment ses détracteurs, à la suite d’une querelle déclenchée sur Twitter par le député David Lammy, qui a ainsi brocardé la présentatrice vedette pour s’être mise en scène sur des photos avec des enfants ougandais à l’occasion de la campagne annuelle de l’association caritative Comic Relief. Ses posts ne feraient que perpétuer des “stéréotypes éculés qui n’aident en rien”, a lancé le député de Tottenham.

D’autres l’ont également accusée d’avoir voulu étaler sa générosité au détriment de l’enfant qu’elle tient dans ses bras, comme si ce dernier n’était qu’un accessoire ou un chiot. Son commentaire, “Ça m’obsède”, n’a rien fait pour calmer les esprits, manifestation de ce syndrome du sauveur blanc qui exaspère aujourd’hui tant de Britanniques noirs comme moi. On a traité ces photos posées de “porno de la misère”, une notion que j’aurais tendance à approuver.

Je ne dis pas que Dooley ne fait pas quelque chose de bien, qu’elle n’a pas le cœur pur, ni de nobles intentions. Je l’ai adorée dans [l’émission de télévision] Danse avec les stars, et ses talents sur la piste lui ont légitimement valu d’être considérée comme un trésor national. Mais il est impossible de se voiler la face : Lammy a raison. Cette idée du sauveur blanc est sans cesse véhiculée par les médias qui relaient des images de stars blanches en train d’étreindre ou de danser avec des enfants noirs pauvres en Afrique, ce que les organisations caritatives comme Comic Relief aiment visiblement tant mettre en avant.

Une image profondément destructrice

Cette vision-là, du “noble sauvage” et de la victime, diffusée dans le monde entier, est profondément destructrice pour notre psyché. Elle ne contribue pas à notre estime de soi, ne nous aide guère à comprendre notre place dans le monde. Elle favorise la stigmatisation, renforce l’image de soi déséquilibrée et négative qu’ont beaucoup de Britanniques noirs.

Mon père est nigérian, ma mère vient de Trinidad — je ne sais que trop à quel point il est lassant, et irritant, de voir ces clichés d’Africains qu’il faut tout le temps sauver. Ça ne serait pas si grave si d’autres images de l’Afrique étaient tout aussi répandues, comme ces Nigérians que je connais, qui sont pleins aux as, bardés de diplômes (là-bas, on ne vous considère que